D’ici le 20 décembre prochain, la cour de justice d’Avignon devrait prononcer son verdict quant au sort des 51 hommes jugés lors du procès de l’Affaire des viols de Mazan. Le principal mis en cause, Dominique Pelicot, y est jugé pour avoir drogué, violé et organisé des viols sur celle qui est alors sa femme : Gisèle Pelicot. Elle a été victime de viols à répétition de la part d’inconnus que celui-ci contactait via une plateforme de rencontres. Les accusés ont défilé à la barre, leurs discours témoignant de la réalité de la culture du viol dans notre société.
La gravité des faits
Le 2 novembre 2020, Gisèle Pelicot apprend qu’elle a été victime de viols à répétition depuis 2011. Celui qui est à présent son ex-mari, par un site de rencontres, contactait des inconnus qui venaient alors violer son ex-femme. Ce sont 50 hommes qui défilent à la maison familiale de Mazan pour commettre leurs crimes. 92 viols qui sont dénombrés par les vidéos retrouvées sur l’ordinateur saisi de Dominique Pelicot. Du fait de la soumission chimique, la victime ne se souvient de rien.
Le 2 septembre dernier le procès sur l’Affaire des viols de Mazan s’ouvre à Avignon. Gisèle Pelicot décide de lever le huis clos permettant aux personnes qui le souhaitent d’y assister. Semaines après semaines, les accusés défilent à la barre. Les 50 hommes sont entendus par la cour de justice et, grâce à la diffusion de leur discours sur les médias, par toute la France.

Procès des viols de Mazan (croquis d’audience) © Marion Dubreuil (RMC)
« Je ne savais pas qu’elle dormait, qu’elle était droguée »
Nombreux sont ceux qui blâment la seule personne de Dominique Pelicot parmi les accusés comme s’ils n’avaient pas pris part aux actes criminels pour lesquels ils sont jugés. Une partie d’entre eux admet avoir reconnu que la femme dormait au bout d’un « certain temps », l’acte entamé. Pourtant, les vidéos ne les desservent pas. Gisèle Pelicot, blême sur le lit conjugal, ronfle à plusieurs reprises, signe de son inconscience.
« Une fellation pendant le sommeil ? Bah, ma femme adorait s’endormir avec mon sexe dans sa bouche comme si elle suçait le pouce, alors… » déclare un des coaccusés. S’affirme ici l’infantilisation dont sont victimes les femmes. Ce phénomène souhaite considérer les femmes comme plus jeunes qu’elles ne sont, mettant en avant un caractère d’innocence qui se retrouvent chez les enfants. Cela va de pair avec l’industrie pornographique qui attire un public par des titres de vidéos tous plus réducteurs les uns que les autres. La culture du viol touche tous les aspects de la société.
« Mais enfin son sexe était lubrifié »
C’est ce qu’affirme un des coaccusés comme motif de défense. L’expert présent n’a pas manqué de lui rappeler que « la lubrification peut être mécanique, elle n’est en aucun cas un signe de consentement ou d’acceptation ».
Mme Sylvie Menvielle plaide l’acquittement pour Husamettin D., 43 ans, coaccusé. Les vidéos montrent les deux hommes violer Gisèle Pelicot. L’avocate estime que ces vidéos « révèlent un jeu sexuel à trois », dans lequel on peut voir Gisèle Pelicot « faire un mouvement de bassin pour se positionner ». Ces accusations provoquent l’indignation de la victime. Elle est accablée lorsque celle-ci ne faisait que dormir sous l’emprise de la drogue. Ce phénomène de remise en cause de la victime est récurrent dans les affaires de viols, d’agressions sexuelles ou de harcèlements sexuels.
La nonchalance et l’air presque décontracté dont témoigne Dominique Pelicot a surpris plus d’une fois la salle d’audience. Si ses coaccusés se victimisent, lui, ne manque pas de dire « je suis un violeur, il faut reconnaître les choses et s’assumer. ». Une peine maximale de 20 ans de prison a été requise contre lui.
Sophie Bakker
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